Manifestation au Sénat : discours de Nazarpek
le 22 novembre 2008
Nous avons besoins de cette loi de pénalisation de la négation du génocide des arméniens. Non seulement pour défendre notre mémoire, celle de nos parents et de nos grand-parents, mais nous avons aussi et SURTOUT besoins d’une loi pour NOUS protéger AUJOURD’HUI et ICI, en qualité de citoyen français à part entière. Et ce n’est pas une loi mémorielle qui permettra de nous protéger.
Car nous sommes des victimes, de manière tout à fait contemporaine, de la politique turc de négation d’état qui propage à travers le monde des théories pour justifier et banaliser les déportations massives d’arméniens en 1915. Pour l’état turc actuel, il n’y a pas eu de génocide. Alors, pourquoi sommes nous ici devant le Sénat français, 93 ans après. Avions-nous le choix de rester sur nos terres ancestrales? Pourquoi pratiquement tous les chrétiens d’Anatolie ont disparu ou émigré un peu partout dans le monde ? Nier le génocide, revient à dire que les arméniens de Diaspora ont décidé de quitter leur terre natale de leur plein gré. Nier le génocide, cela revient à NIER notre identité.
En pénalisant la négation du génocide des arméniens, la France se protége elle même d’une ingérence insupportable qui consiste à diffuser à travers le monde une histoire officielle, qui plus est mensongère. C’est exactement l’idée que conteste le collectif d’historien « Liberté pour l’histoire » pour lequel, je cite, "tout ce qui peut relever d’une histoire officielle est incompatible avec ce qu’est, dans une démocratie, la démarche de l’historien ». Il ne faut justement pas voir cette loi de pénalisation comme l’établissement d’une vérité officielle, d’une reconnaissance ou même d’une certaine compassion, mais plutôt comme une réponse adéquate à une attaque singulière, politiquement motivée, et dont l’ampleur n’a d’égal que son cynisme.
Par ailleurs, faut-il rappeler qu’à Lyon, pas plus tard qu’en 2006, de violents affrontements ont opposés des manifestants négationnistes turcs à des jeunes lycéens français? Doit-on attendre que le comité Talaat Pacha, du nom du bourreau du peuple arménien, qui avait organisé une marche à Berlin en l’honneur de ce « Hitler Turc », récidive ici en France au risque de faire monté d’un cran encore les tensions?
Dans ce contexte, on comprends très mal l’initiative du collectif « Liberté pour l’histoire » qui cherche à abolir les lois dites mémorielles. On se demande d’ailleurs pourquoi ce collectif n’exerce pas justement cette liberté pour répondre aux négationnistes qui sont à la solde du gouvernement turc, plutôt que de mettre des battons dans les roues de la cause arménienne. A cause de ce collectif, le gouvernement turc se frotte les mains, TOUT comme les révisionnistes du Front National qui exige l'abrogation la loi Gayssot.
Notre route est longue, mais la jeunesse est toujours présente et elle entends bien mener le combat jusqu’au bout. Elle était déjà présente en 2000, souvenez-vous, tous les jours pendant 150 jours un sitting avait lieu ici même et avait finit par porter ses fruits. Eh bien la jeunesse était là, et elle est là encore aujourd’hui. Depuis le 15 octobre, elle organise de nouveaux sitting devant le Sénat.